Histoire
article | Temps de Lecture10 min
Histoire
article | Temps de Lecture10 min
Initiée par Saint Louis en 1240, poursuivie par Philippe III le Hardi puis Philippe IV le Bel, Aigues-Mortes et ses remparts, symbole de la puissance royale, est l’unique port de commerce du royaume de France durant près de deux siècles.
Aigues-Mortes est fondée par Louis IX en 1240. Elle permet l’ouverture du royaume sur la Méditerranée, en lui offrant un port d’embarquement vers la Terre Sainte et un port de commerce. Cette bastide, la plus orientale du Languedoc capétien, placée à la tête d’un ensemble portuaire complexe, a été pourvue d’une enceinte monumentale par Philippe III le Hardi et Philippe IV le Bel entre 1270 et 1300, conformément à la volonté du saint roi.
La fortification, longue de 1640 mètres, donne à la cité un caractère presqu’irréel et permet de mieux comprendre l’intérêt stratégique de cette région au Moyen Âge, la politique capétienne de centralisation du pouvoir et les mécanismes de la construction de l’État français. Symbole de cette puissance royale, Aigues-Mortes est l’unique port de commerce du royaume de France durant près de deux siècles.
C’est à partir de 1240 que Louis IX se lance, sur la côte sablonneuse du littoral languedocien, dans une vaste opération d’aménagement. Son projet : doter la France d’un port convenable sur la Méditerranée, protégé par une cité qui serait à la fois porte du royaume, gardienne des activités portuaires et symbole de la puissance capétienne grandissante.
Pour mener à bien ce projet, le roi récupère de l’abbaye de Psalmodi, détentrice de la plus grande partie des terres de la région, une petite portion de territoire qui lui donne une fenêtre sur la mer, entre les possessions de l’empereur Frédéric et celles de Jacques, roi d’Aragon, seigneur de Montpellier.
La fondation d’Aigues-Mortes dans ce contexte géopolitique doit se comprendre comme une affirmation de la puissance capétienne.
L’accord avec les religieux n’est pas encore signé, que le roi jette les bases des premiers monuments du site. Entre 1240 et 1248, les bâtiments royaux sont exécutés à grands frais, matériaux et main d’œuvre étant importés, puisque la zone est alors vide d’homme et ne dispose pas de la pierre nécessaire aux constructions.
Pour attirer une population nombreuse, le roi accorde en 1246 une charte de privilèges particulièrement généreuse, octroyant d’emblée à Aigues-Mortes une organisation civique sous la forme d’un consulat.
Le premier édifice achevé par Louis IX est la tour-donjon qui défend l’ensemble castral. Le château, dont la construction a été entreprise simultanément, a été détruit en 1421, au plus fort de la lutte entre Armagnacs et Bourguignons. Il est reconstruit plus tard, avant de finalement laisser place au XVIIe siècle au logis du Gouverneur. À l’origine, la tour et le château étaient défendus par un fossé dont il ne subsiste qu’une partie de la douve annulaire ceignant la tour, et par une palissade de bois.
Louis IX veut doter sa cité de remparts pour la protéger à la fois d’éventuels ennemis et des vents qui amoncelaient le sable dans les rues. Pour cela, il obtient en 1266 du pape et des seigneurs voisins l’autorisation de percevoir une taxe sur toutes les marchandises qui passent par la ville. C’est la création de la taxe du denier par livre (0,004 %).
Louis IX, qui meurt en croisade à Tunis en 1270, n’a pas eu le temps de voir aboutir son projet. Les travaux de l’enceinte débutent deux ans après sa mort. Philippe III le Hardi confie la tâche au Génois Guillaume Boccanegra, qui se charge de la construction contre la perception de la taxe du port. Mais Boccanegra meurt en 1274, alors que les travaux sont à peine commencés, et ses héritiers renoncent à poursuivre l’œuvre de leur père.
En 1278, Philippe III ajoute aux travaux de l’enceinte la construction d’un quai de pierre le long du chenal qu’il fait percer au regard de la ville, désigné aujourd’hui sous le nom de La Peyrade, dans le but de réduire la distance entre le lieu d’ancrage des navires de haute mer et la cité. Les travaux se poursuivent lentement et Aigues-Mortes est encore une ville ouverte lorsque les vaisseaux de l’amiral catalan Roger de Lluria viennent attaquer le port en 1285 et s’emparer des navires à l’ancre et de leurs marchandises. C’est sans doute ce douloureux épisode qui accélère l’entreprise.
C’est donc à l’extrême fin du XIIIe siècle ou au tout début du XIVe siècle, que se place l’achèvement de l’ensemble défensif. La durée de l’entreprise s’explique par l’ampleur des travaux : il s’agissait de clore, par un rectangle presque parfait, non seulement la ville naissante, mais encore une portion de terre laissée vacante, accueillant jardins, cimetière, arsenal.
L’enceinte s’étend sur une longueur de 1640 mètres. Les courtines
s’élèvent à environ 11 mètres et ont une épaisseur approchant les 3 mètres. Les différents ouvrages qui s’égrènent tout au long de ce périmètre, tours (cinq), grandes portes (cinq) et petites portes (cinq), s’élèvent en moyenne à 18 mètres au-dessus du sol.